3 romans new-yorkais qui scrutent avec intelligence la comédie des apparences et des extravagances...
L'envers du destin
Lors de sa publication aux USA en 2015, Barak Obama a déclaré que c’était le meilleur roman de l’année (c’est Michelle qui lui avait fait lire) et il avait sans doute raison. L’histoire à première vue n’a rien d’exceptionnelle : Lotto, jeune mâle blanc de 22 ans issu d’une riche famille américaine du Sud, tombe raide dingue amoureux de Mathilde, une beauté venue de nulle part. Renonçant à l’héritage familiale et à ses innombrables conquêtes, il épouse sa belle inconnue en deux semaines contre l’avis de sa mère. Idolâtré, envié par leurs amis, le couple traverse les années avec grâce et légèreté malgré les difficultés de Lotto à lancer sa carrière d’acteur et malgré les éblouissements de sa consécration tardive en tant que dramaturge. Qu’on ne s’y trompe pas, Lauren Groff n’est pas en train de nous raconter une énième histoire d’amour réussie ou une fresque conjugale aux motifs fleuris. Si un lecteur attentif sent percer l’ironie au détour des phrases, ce n’est que dans la deuxième partie, où émerge le point de vue de Mathilde, que le récit prend alors tout son sens. Opérant un prodigieux renversement romanesque et féministe, l’auteur nous montre à travers la colère de son héroïne que l’amour, même intense, ne peut effacer l’inexorable vérité des êtres. On aime l’écriture fluide et en apparence sans entrave de la romancière qui trouve mille et une manières de nous faire entrer dans le quotidien de ses personnages, que ce soit à travers des descriptions héroïco-comiques, les pièces de théâtre de Lotto ou les discussions de leurs camarades d’université.
Les ingrédients : Tendre est la nuit de Francis Scott Fitzgerald pour le slow flamboyant et douloureux d’un couple qui s’aime + Mudwoman de Joyce Carol Oates pour les écorchures secrètes d’une femme forte.
Les effets : on essaie de regarder la vie avec les yeux de nos proches, en tentant de deviner dans chaque silence, ce qu’ils n’ont jamais dit. Les vacances sont enrichissantes mais un peu épuisantes.
Les furies, Lauren Groff, 427 P., éd. de l’Olivier.
Amitié empoisonnée
Entre le jeune orphelin du Mississipi et la New-Yorkaise sophistiquée, il n’y avait a priori pas d’histoire possible. Et pourtant. Mal-aimés mais animés tous deux par un sens tragique de l’élégance, Truman Capote et Babe Paley se sont découverts une folle et dangereuse amitié l’un pour l’autre. Une évocation captivante de la haute société américaine dans la demie-insouciance des années 60.
Les Cygnes de la Cinquième Avenue, Mélanie Benjamin, 432 P., éd. Albin-Michel.
Carte VIP
Engagée dans une start-up new-yorkaise qui vient de lancer un réseau social destiné aux personnalités de la haute société, Evelyn met toute son énergie à recruter de nouveaux membres. Pour cela, elle doit écouter les conseils de sa parvenue de mère, fréquenter des gens insouciants et dépensiers, piétiner sa fierté, se ruiner en sorties et en vêtements, cacher les déboires judiciaires de son père et apprendre tous les codes cachés d’un monde basé en grande partie sur les apparences. Un roman d’apprentissage satirique et divertissant.
Les ambitieuses, Stephanie Clifford, 448 P., éd. Presses de la Cité.