A l’occasion de la publication de son nouveau roman Une vie sans fin, le sale gosse des lettres françaises nous a invité dans sa suite d'hôtel à Bruxelles pour une confession entre gravité et hilarité. Allongé sur le lit « comme chez sa psy », il nous a révélé son goût pour la paternité.
Oubliées les provocations de dandy toxico, Frédéric Beigbeder qui nous avait déjà séduites avec son très romantique Oona et Salinger (2014), revient avec un roman métaphysique et autobiographique. Intitulé Une vie sans fin, le récit met en scène la quête échevelée de l’écrivain pour l’immortalité tant désirée que promettent les récentes avancées du transhumanisme. Une lecture ébouriffante entre humour existentiel, exposés scientifiques et tribulations familiales.
La dernière photo que vous avez prise ?
Un photographe vient de me tirer le portrait dans mon lit. Il m’a demandé de sourire et je n’avais pas envie. Je crois que c’était pour un article sur le bonheur et qu’il est traumatisé.
Un malheur plus grand que la mort ?
La mort de quelqu’un qu’on aime. Quand j’avais 30 ans, je vous aurais répondu « ne pas rentrer au Club 54 ».
photo ©JF Paga
Un son/musique qui vous apaise ?
Le bruit de la pluie quand on est à l’intérieur. Les cris d’oiseau en revanche que l’on met dans les spas c’est une catastrophe.
Une faille dans votre éducation ?
Je ne sais pas faire marcher une machine à laver. En revanche je connais très bien le fonctionnement du lave-vaisselle que j’adore vider. C’est un très bon antidépresseur.
Un talent caché ?
Je sais loucher d’un seul œil. Regardez.
Quel est pour vous le comble de l’autodérision ?
La semaine dernière, je buvais un verre au Ritz et 3 types cagoulés sont arrivés avec des armes. Je me suis réfugié dans les toilettes et je me suis dit que ce serait un comble de crever ici alors que je venais de publier Une vie sans fin.
Un snobisme qui vous laisse de glace ?
Les carrés VIP dans les boîtes, c’est toujours le coin le plus chiant de la boîte.
Un selfie qui manque à votre palmarès ?
Il m’est arrivé de croiser des gens que j’admirais sans oser prendre des photos. Par exemple, je n’ai pas de selfie avec Mick Jagger. Je l’ai vu au Montana et j’étais tétanisé.
Un tableau dans lequel vous voudriez vivre?
« Thérèse dreaming » de Balthus. C’est un tableau qui fait l’objet d’une pétition pour qu’on le retire du MET à New-York. On y voit une jeune-fille un peu alanguie les jambes découvertes. Je me verrais bien à l’arrière-plan en train de cuisiner des œufs brouillés.
Un personnage de fiction à inviter à dîner?
Seymour Glass, le soldat qui se suicide dans une nouvelle de Salinger. Tout ce qu’il dit est original, malheureusement il se tire une balle à la fin.
Le menu idéal d'un repas génétiquement modifié?
Une salade chicons-pommes, des œufs brouillés à la truffe, ensuite un Mont d’Or liquide et une clémentine bien sucrée parce que génétiquement modifiée.
Votre identité probable dans une vie antérieure?
J’ai rencontré un vieux moine jaïne en Asie qui balaie devant lui de peur d’écraser des insectes. J’espère que j’étais l’un d’entre eux.
Quel est le principal message d’espoir de cet ouvrage de « science non fiction » ?
Un père de famille est aussi impressionnant qu’un post-humain augmenté. La dernière fois que j’ai changé la couche de ma fille, je me suis dit que j’étais un vrai super-héros.
Une vie sans fin, 360 P., éd. Grasset.
publié dans le magazine GAËL (05/2018) www.gael.be