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Photo du rédacteurPaloma de Boismorel

Les nouveaux codes amoureux

Est-ce que l’amour est devenu plus facile ?

Se déplacer, se nourrir, se divertir, communiquer... la technologie nous simplifie (théoriquement) la vie mais qu’en est-il des relations amoureuses?

Si les tourtereaux se sont émancipés d’un certain nombre de limitations physiques, sociales et familiales tout au long du 20ème siècle, pas sûr que les histoires d’amour soient plus heureuses aujourd’hui. D’abord, parce qu’il faut toujours être deux pour s’aimer (même si certains ont lâché l’affaire et tenté la soligamie en se mariant avec eux-mêmes) et ensuite parce que nos récentes libertés s’accompagnent de nouveaux problèmes plus insidieux et parfois plus cruels. Quand Roland Barthes décrit dans Fragments d’un discours amoureux (1977) les supplices qu’un simple téléphone inflige à un homme épris, pas besoin de vous faire un dessin sur l‘intensité des tortures que représentent les réseaux sociaux de nos jours. Pour décrypter les codes cachés de l’amour façon 2020, nous avons sélectionné quatre des meilleurs romans de la rentrée sur le sujet. Écrits par des femmes, ils témoignent aussi bien des nouvelles formes de la féminité que de la relation (toujours aussi compliquée) à l’être aimé.


Chasse à l’homme

L’histoire : Adélaïde déballe avec excitation ses affaires dans son minuscule appartement parisien. Elle retrouve enfin sa liberté après 7 ans de relation et de routine avec Elias. Malgré les statistiques en sa défaveur, la quadragénaire est déterminée à trouver enfin l’Homme de sa vie. Elle s’investit dans son métier d’attachée de presse pour une maison d’édition indépendante et doit compter chaque jour un peu plus sur le soutien de ses amies féministes et sorcières. Il semblerait bien que le chemin de l’amour soit pavé de désillusions…

Ce qui nous emballe : se promener dans les coulisses des milieux littéraires et goûter l’ironie de cette fiction qui provoque plus de grimaces que de sourires. Le réalisme cruel de Chloé Delaume, connue pour ses essais féministes, permet de démystifier le grand idéal du Couple, celui qui enflamme le cœur des jeunes filles et torture celui des femmes qui le cherchent coûte que coûte. Une lecture douche-froide qui rafraichît les idées.

LE CŒUR SYNTHÉTIQUE, CHLOÉ DELAUME, 208 P., ÉD. DU SEUIL.



Pour le meilleur et pour le pire


L’histoire : Il ne faut pas longtemps à Sixtine pour se décider à épouser le prince charmant qu’elle a rencontré au mariage d’une amie. Pierre-Louis Sue de la Garde est beau, brillant, il sort d’une grande école et vient de créer sa boîte de conseil mais il est surtout issu d’une famille ultra-catholique très respectée par les parents de la jeune fille. Malgré l’admiration qu’elle lui voue, Sixtine déchante vite face à sa grossesse difficile et à la vie austère que lui impose son très pieux mari engagé dans la défense de valeurs religieuses aux tonalités guerrières.

Ce qui nous emballe : Un premier roman impressionnant aussi bien sur le plan de la maîtrise romanesque que celui de l’analyse sociologique d’un milieu que l’autrice semble bien connaître. Sans s’attaquer à la foi catholique mais à ceux qui la déforment, Maylis Adhémar révèle les ravages intimes de l’intolérance.

BÉNIE SOIT SIXTINE, MAYLIS ADHÉMAR, 304 P., ÉD. ROBERT LAFFONT.



Jusqu’au bout du monde

L’histoire : Née d’un marin norvégien épris de littérature et d’une tenancière de café bretonne à l’autorité silencieuse, Liv Maria est une adolescente insouciante qui lit Faulkner, pêche des oursins et joue les chauffeurs de taxi sur l’île de son enfance. Exilée par sa mère après avoir été victime d’une tentative de viol à l’âge de 17 ans, la jeune fille se retrouve à Berlin et tombe amoureuse de son professeur d’anglais, un quadragénaire irlandais marié et père de trois enfants. Ce linguiste cultivé lui a promis de lui écrire une lettre en rentrant dans son pays mais Liv Maria n’a pas fini d’attendre et d’apprendre à oublier.

Ce qui nous emballe : L’écriture précise et virevoltante de Julia Kerninon qui nous fait traverser les années et les continents en compagnie d’une héroïne au destin hors du commun mais toujours incertain.

LIV MARIA, JULIA KERNINON, 193 P., ÉD. L’ICONOCLASTE.



À bâtons rompus

L’histoire : Imaginez qu’avant de partir à l’hôpital pour accoucher, votre voisine vous confie son petit garçon de 5 ans et qu’elle ne revienne jamais. Sandra, qui proclame son célibat avec éclat, se retrouve du jour au lendemain une mère de substitution pour les deux enfants d’Ada et une confidente pour son compagnon. Son indépendance de femme libre est-elle remise en question ? Entre l’architecte en deuil et la libraire libre-penseuse se noue un dialogue sentimental et philosophique dont les enjeux (notamment bioéthiques) sont passionnants.

Ce qui nous emballe : Alice Ferney analyse avec poésie et acuité les ressorts cachés des relations humaines dans une fiction où tout peut basculer d’une page à l’autre.

L’INTIMITÉ, ALICE FERNEY, 377 P., ÉD. ACTES SUD.



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